De ses débuts comme assistant réalisateur pour Costa Gavras à ses nombreux prix glanés à Sundance, Cannes, Locarno ou encore Berlin (où Kontinental '25 vient de lui valoir l'Ours d'Argent) la star du cinéma d'auteur indépendant a parcouru du chemin. Radu Jude revient sur Kontinental '25, son (presque) dernier film absurde et politique.
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Quand un simple acte administratif tourne au drame : Orsolya, huissière à Cluj ordonne l'expulsion d'un sans abris logeant dans la cave d'un immeuble voué à devenir un hôtel. Pendant l'expulsion, l'homme se suicide. Submergée par la culpabilité, Orsolya entame un voyage intérieur où se mêlent conscience sociale, impuissance morale et affirmation identitaire. Kontinental '25 creuse les fissures d'une roumanie contemporaine.
Documenter les tensions du présent
Si Honoré de Balzac se décrivait comme un historien du "présent qui marche", Radu Jude pourrait en être la version contemporaine. Son choix de tourner Kontinental '25 à l’iPhone en une dizaine de jours seulement, en est sans doute la démonstration la plus éclatante. Pour le cinéaste, l’intelligence artistique consiste à savoir tirer parti des outils disponibles : en mesurer les possibilités comme les limites, et les employer en pleine conscience. Lui qui a toujours voulu expérimenter revient ici aux fondements mêmes du cinéma, du côté des Frères Lumière et de leur Sortie d’usine. Kontinental '25 privilégie ainsi les plans fixes, un faible découpage, une mise en scène sobre et des décors naturels. Un exercice de style et de forme répondant aussi à des contraintes financières "Si l'envie est d'explorer, que cela répond à une urgence et qu'on ne peut pas attendre 5 ans pour être financé, l’iPhone est un bon commencement " explique-t-il.
« La Roumanie d’aujourd’hui est dans une situation géopolitique très compliquée mais très intéressante pour la fiction », note le cinéaste. Frontalière de l’Ukraine, la ville de Cluj-Napoca, au cœur de la Transylvanie, devient un véritable personnage dans Kontinental ’25. Symbole de la réussite économique roumaine, surnommée la « San Francisco » du pays, elle révèle aussi ses fractures : expulsions, spéculation, quartiers inaccessibles aux plus pauvres. « L’architecture garde les traces d’une histoire traumatisante », souligne le cinéaste, pour qui ce contexte géographique, urbanistique, architectural et historique façonne le récit du film.
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De Rossellini à Rohmer, les sources vives du cinéma de Radu Jude
L’idée de raconter l’histoire d’un SDF sillonnant la ville et de la huissière chargée de l’expulser naît d’un fait divers. Radu Jude garde ce sujet en mémoire jusqu’à la découverte d’Europe 51 de Rossellini, où Ingrid Bergman incarne une bourgeoise transformée par la douleur et rejetée par les siens. « Tout d’un coup, les directions pléthoriques que j’avais pour ce projet sont devenues plus simples ! », raconte Jude. Son film s’inscrit alors en dialogue avec Rossellini, en proposant une prise de conscience plus réaliste et moins idéalisée.
Autre référence pour ce film, le réalisateur Eric Rohmer et la manière dont il a su faire des mots la matière première de son cinéma. Dans Kontinental ’25, le dialogue est le moteur de l’action. Orsolya (Eszter Tompa) répète inlassablement la vision qui la hante à ses proches et son récit se transforme peu à peu. La parole, insiste Jude, est le lieu où s’expriment nos détresses et nos contradictions, parfois jusqu’au comique, « ce qui nous rend humains ».
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Extraits sonores
Extrait du réalisateur Roberto Rossellini sur la RTS en 1958
Extrait de la musique de Robotu de SEXPULAPISTOL
Plus d'informations
Kontinental 25 sort le 24 septembre 2025 au cinéma
Une rétrospective au mk2 Bibliothèque x Centre Pompidou est consacré au réalisateur Radu Jude et à l'ensemble de son oeuvre
Le livre Radu Jude - Le cinéma peu attendre paraît aux éditions de l'oeil
Dracula, le prochain film de Radu Jude sort le 14 octobre au cinéma
[SRC] https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-midis-de-culture/radu-jude-pour-kontinental-25-4793269
