Ce mardi 30 septembre, le président de la République a invité les élus d'outre-mer signataires de l'Appel de Fort-de-France à un dîner à l'Elysée pour faire le point sur les demandes d'évolution statutaire. Un rendez-vous boycotté par une partie des élus guyanais qui ne parvient pas à convaincre les participants de son intérêt.
Romain Allimant •
Il l'a annoncé au JT de 13h de Guyane la1ere, ce mardi 30 septembre : Gabriel Serville ne se rendra pas au dîner prévu ce soir à l'Elysée. "Les Guyanais sont respectables, mais nous devons être respectés" a martelé en direct le président de la Collectivité Territoriale de Guyane qui a appelé à "inverser le rapport de force".
Une des raisons de la colère de Gabriel Serville réside dans son entretien, la veille, avec le secrétaire général de l'Elysée. "Les doléances de la Guyane ont été transmises, j'ai remis tous les documents qui étaient en ma possession, notamment le document d'orientation sur l'évolution institutionnelle. J'ai fait face à un mur d'incompréhension parce que le secrétaire général m'a fait comprendre qu'il n'était pas au courant des problématiques de la Guyane". Un manque de considération qui a poussé le président de la CTG à boycotter le dîner prévu ce soir. Jean-Victor Castor, député MDES de la 1ere circonscription de Guyane, ne devrait pas se rendre non plus à ce rendez-vous.
Le dîner de ce mardi soir intervient dans le cadre d'un suivi présidentiel, après plusieurs rencontres ayant pour but de répondre à "l'Appel de Fort-de-France" de mai 2022, dans lequel les présidents des régions de Guadeloupe, Réunion, Mayotte, Martinique, Saint-Martin et Guyane avaient lancé un appel solennel à l'État pour qu'il change ses politiques d'aide au développement de leurs territoires.
Un rapport contesté
Le député Davy Rimane, lui, entend répondre à l'invitation "en tant que président de la délégation outre-mer". "Je serai présent ce soir pour écouter ce que le président va dire", confiait-il cet après-midi. L'élu guyanais doute cependant de la réelle avancée provoquée par ce dîner. "Il y aura peut-être une annonce mais on ne peut pas continuer à faire des propositions qui ne sont pas celles demandées".
Le scepticisme de Davy Rimane provient du rapport "Les Outre-mer, notre défi commun", remis à l'Elysée en décembre 2024 par les deux experts Pierre Egéa, professeur de droit public, et Frédéric Monlouis-Félicité, conseil en entreprises. Ce texte formule 71 propositions sur les situations des Outre-mer comme celle de "distinguer trois types de collectivités, celles d’un article 73 rénové et fondé sur l’adaptation ; celles de l’article 74 définies par la spécialité ; celles de l’article 78 centrées sur une véritable autonomie normative".
Exit donc la possibilité d'un statut sui generis inscrit dans la Constitution que le Congrès des élus de Guyane a adopté à la majorité en mars 2022 et qui a débouché sur l'élaboration d'un Document d'orientations sur l'évolution institutionnelle de la Guyane.
https://www.flipsnack.com/76EFA7EEFB5/le-document-d-orientations-relatif-l-volution-institutionnell/full-view.html)
"Le rapport sur lequel s'appuie l'Elysée ne répond pas sur la question institutionnelle", estime Davy Rimane qui dénonce un texte dont les "propositions ne sont pas en concordance avec les demandes sur les territoires". Quinze personnes ont été auditionnées en Guyane pour établir ce rapport :
Antoine KARAM, ancien sénateur
Sandra TROCHIMARA, maire de la commune de Cayenne
Gabriel SERVILLE, président de la Collectivité Territoriale de Guyane
Sophie CHARLES, maire de la commune de Saint-Laurent-du-Maroni
Rodolphe ALEXANDRE, ancien président de la Collectivité Territoriale de Guyane
François RINGUET, maire de la commune de Kourou
Ariane FLEURIVAL, présidente du Conseil Économique, Social, Environnemental de la Culture et de l’Éducation de Guyane
de la Culture et de l’Éducation de Guyane Patrick LINGIBE, ancien Bâtonnier, avocat
Bruno APOUYOU, président du Grand Conseil Coutumier
Christiane TAUBIRA, ancienne ministre de la Justice, garde des Sceauxx
Thara GOVINDIN, présidente du MEDEF
Léon BERTRAND, ancien ministre délégué au tourisme et ancien maire de Saint-Laurent-du-Maroni
Georges PATIENT, sénateur de la Guyane
Jean-Luc LE WEST, vice-président Développement, Économie, Tourisme de la Collectivité Territoriale de Guyane
Antoine POUSSIER, préfet de la Guyane
"On va vers une fracture certaine"
En janvier 2025, un autre rapport avait été remis à l'Assemblée Nationale "sur l’avenir institutionnel des outre-mer" par Davy Rimane et Philippe Gosselin, député LR de la Manche. "Nous estimons avoir rendu un rapport conséquent, sérieux et exhaustif. Si l'Elysée n'est pas capable de s'appuyer là-dessus, il y a un problème", lance Davy Rimane. "S'il n'y a pas de réponses sur les demandes des territoires, on va vers une fracture certaine", prévient-il.
Beaucoup d'enjeux donc qui reposent sur un simple dîner, auquel plusieurs autres élus d'Outre-Mer ont refusé de participer, pour relancer le dialogue entre l'Elysée et des territoires qui n'ont pas l'impression que leurs revendications soient réellement considérées.
[SRC] https://la1ere.franceinfo.fr/guyane/une-partie-des-elus-guyanais-boycotte-l-invitation-a-diner-d-emmanuel-macron-a-l-elysee-1628282.html