Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont récemment pris une décision historique en annonçant leur retrait immédiat du Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI).
Cette démarche collective, initiée au sein de la Confédération des États du Sahel (AES), est perçue comme un tournant majeur dans la politique étrangère des trois nations. Elle vise à affirmer leur souveraineté et à repenser leur système judiciaire à travers des mécanismes endogènes, adaptés aux réalités régionales.
Une rupture motivée par le rejet de la « justice sélective »
La coopération initiale entre ces pays et la CPI, après leurs ratifications respectives du Statut de Rome au début des années 2000, était considérée comme constructive. Cependant, les gouvernements de l’AES dénoncent désormais une institution perçue comme un instrument de répression au service de l’impérialisme, accusant la Cour de partialité. En effet, la CPI est critiquée pour cibler principalement les acteurs africains tout en ignorant des crimes graves perpétrés ailleurs dans le monde. Cette justice à géométrie variable est un motif de désenchantement majeur, conduisant à la volonté d’une autonomie judiciaire.
Le développement de mécanismes juridiques internes
Face à cette rupture, les États de l’AES ont l’intention de mettre en place leurs propres instruments pour la justice et la consolidation de la paix. L’objectif déclaré est de renforcer la stabilité régionale en s’appuyant sur des valeurs et des normes propres à leur culture. Les autorités de l’AES insistent sur le fait que cette décision ne signifie pas un recul dans la promotion des droits de l’Homme. Elles réaffirment leur engagement à lutter contre l’impunité, tout en protégeant leurs populations et en garantissant que les auteurs de crimes graves soient traduits en justice, mais selon des modalités qui leur sont propres.
Des répercussions géopolitiques et diplomatiques
Ce retrait coordonné pose un défi à la CPI, dont la crédibilité est déjà mise à l’épreuve par des critiques similaires provenant d’autres pays africains. La décision renforce la position de l’AES en tant qu’entité politique et stratégique indépendante, désireuse de se démarquer des institutions internationales. L’impact de cette action pourrait s’étendre au-delà de la région du Sahel, incitant potentiellement d’autres nations à reconsidérer leur appartenance à la Cour. La question de l’efficacité et de l’impartialité de la CPI à l’échelle mondiale est ainsi relancée. Malgré cette rupture, les gouvernements sahéliens ont précisé qu’ils continueraient à coopérer avec les Nations unies et d’autres partenaires dans le cadre du respect de la souveraineté des États.
Vers une nouvelle architecture judiciaire sahélienne
Un projet de création d’une Cour pénale sahélienne est discuté, ce qui pourrait constituer une avancée significative. Cette juridiction régionale pourrait se voir conférer des compétences étendues sur les crimes internationaux, le terrorisme et la criminalité organisée, renforçant l’autonomie et la capacité de la région à gérer ses propres défis. Le chemin vers un nouveau modèle de justice, centré sur la souveraineté et la résolution interne des crises, est tracé par cette décision.
La Rédaction
[SRC] https://maliactu.net/laes-quitte-la-cpi-vers-une-souverainete-judiciaire-au-sahel/